Rejet des initiatives de Paysage Libre Suisse par le Conseil fédéral

Un mois à peine après l’aboutissement des initiatives pour la protection des forêts et pour la protection des communes, le Conseil fédéral a décidé hier de les rejeter sans contre-projet et a publié un communiqué de presse

Une décision prémâchée et prise à la hâte

Si cette décision n’est pas une surprise en soi (la majorité des initiatives populaires sont rejetées par le Conseil fédéral), on peut être surpris, d’une part, par le peu de temps qui s’est écoulé depuis l’aboutissement de ces initiatives et qui n’a guère permis une réflexion approfondie sur leurs objectifs et, d’autre part, par les arguments difficilement compréhensibles qui ont été avancés pour justifier ce rejet. On y voit facilement la marque de Suisse Eole et de l’OFEN.

Sécurité d’approvisionnement compromise ?

Le communiqué de presse affirme que les initiatives affaibliraient la sécurité d’approvisionnement, ce qui est inexact pour plusieurs raisons :

  • Les initiatives de Paysage Libre Suisse n’empêcheront pas la construction de nouvelles éoliennes. Comme naguère à Rothenthurm, celles-ci veulent uniquement établir des règles contraignantes afin de protéger des intérêts légitimes lors du développement prévu de l’énergie éolienne, notamment nos forêts en tant qu’écosystèmes précieux et refuge de la biodiversité, ainsi que la participation de la population concernée.
  • Une étude publiée par l’OFEN en 2022 estime le potentiel éolien en dehors des forêts à 15 TWh, soit près de 25% de la consommation actuelle d’électricité en Suisse. Il existe donc également un potentiel suffisant pour construire des éoliennes en dehors des forêts. Il n’est donc pas question d’une interdiction de fait de la technologie, comme l’affirme le communiqué de presse du Conseil fédéral !
  • En 2024, la consommation nationale d’électricité était de 61,8 GWh pour une production de 76,2 GWh [3]. L’année dernière, la Suisse a donc produit 23% d’électricité de plus qu’elle n’en a consommé. Ainsi, avec l’augmentation progressive du photovoltaïque sur les toits et le développement des lacs d’accumulation, la sécurité d’approvisionnement peut être assurée même avec un développement plus modéré de l’énergie éolienne.

Revendication de PLCH déjà prises en compte ?

Le communiqué de presse du Conseil fédéral affirme que la législation en vigueur tient déjà compte des principales revendications des initiatives.

C’est faux pour les raisons suivantes :

Initiative pour la protection des communes

Elle exige que la population de toutes les communes concernées par les éoliennes ait son mot à dire. Mais dans les cantons de Lucerne, Saint-Gall, Schaffhouse, Neuchâtel, Jura, Soleure et Fribourg et bientôt Zurich, les éoliennes peuvent déjà être construites sans l’accord des communes concernées. Aujourd’hui, plus d’un tiers de la population suisse n’a donc pas le droit de s’exprimer sur l’implantation d’éoliennes dans ou à proximité immédiate de sa commune de résidence.

Initiative pour la protection des forêts

Actuellement, les éoliennes en forêt sont possibles partout et sont planifiées par de nombreux cantons, comme l’indique également le communiqué de presse du Conseil fédéral. Dans le canton de Zurich, par exemple, presque tous les projets de parcs se trouvent entièrement ou partiellement dans des forêts parfois très proches de l’état naturel et très précieuses sur le plan écologique. Et dans bien des cas, en raison de la classification « intérêt national » de la majorité des parcs éoliens, il est difficile de faire valoir en justice les intérêts de la protection de la nature face au lobby éolien. L’initiative pour la protection des forêts demande de renoncer à l’implantation d’éoliennes industrielles dans les forêts et à proximité immédiate de celles-ci. Elle ne demande donc rien d’autre qu’une poursuite conséquente de la protection des forêts telle qu’elle est appliquée avec succès en Suisse depuis 1876.

Le sujet sera soumis au parlement en 2026 et la votation devrait avoir lieu en 2027.